MINI MARCOS ADVENTURE
Après maintes et maintes recherches et discussions avec le Mini Marcos Owners Club, je découvris le fruit de ma convoitise, une Mini Marcos ! Romain, un ami compatissant possédant un plateau, accepta de s’aventurer sur les routes senestres de la Perfide Albion ; la date du samedi 22 mars 2008 fut arrêtée pour en prendre livraison.
Le vendredi 21, l’ami Romain arrive de Rouen. Il passe une courte nuit ….sur le canapé…en compagnie du chat… Ma tâche fut d’abord de le réveiller à 4h du matin, chose ô combien ingrate, Le bateau partant de Dieppe qui se trouve à une heure de route, il n’y a pas de temps à perdre.
Le petit déjeuner pris sur le pouce, nous voilà dans la cour, fin prêts à monter dans l’auto, une Nissan coupé 100 NX, surbaissée, tractant le plateau… « Vous comprendrez bientôt le pourquoi du surbaissé ».
L’attelage est assez long, la nuit encore noire, les yeux de Romain pas encore tout à fait ouverts, et là, ça commence à mal s’annoncer : le convoi s’approche du talus bordant le champ en face du portail, en effet, il faut prendre large pour ne rien arracher ; Romain avance encore un peu, mais il manque quelques centimètres pour que tout passe ; la roue avant droite s’engage sur l’herbe du talus, puis la roue avant gauche, on avance encore un peu, il faut encore manœuvrer , reculer de quelques centimètres, et C’EST LE DRAME, la voiture n’avance plus !!! Serait –elle embourbée ? Il ne pleut jamais en Normandie, surtout en mars, c’est bien connu! Non, elle n’est pas enlisée, juste plantée au niveau du bas de caisse sur la seule bosse du talus ! Satanée bagnole, on essaie de se dégager. Pas moyen, complètement bloquée ; coup de panique, le bateau n’attend pas. Ce n’est pas grave, on décroche le plateau, j’allume la lumière de la cour, on y verra mieux, il y a de la place sur la route, personne ne passe à cette heure. Remorque décrochée, ça devrait aller. On essaye, les roues patinent, la voiture ne bouge pas d’un centimètre, je vais chercher de grosses planches ; rien à faire, elle est scotchée ; on pousse, on tire, sans résultats…Reste la solution finale, prendre la 406, atteler l’ensemble à la barre de remorquage, Ok, on essaie, avec le crochet arrière de la Peugeot , il n’a pas l’air de se passer grand-chose, j’insiste, sans résultat ; par contre mes pneus commencent à avoir chaud, puis une drôle d’odeur commence à se faire sentir, l’embrayage, en fin de vie, n’apprécie pas du tout la blague, ca fume de partout et la Nissan ne veut toujours rien savoir… Je commence à craindre le pire. Anne, réveillée par les allées et venues, est à la fenêtre de la cuisine, et comprend qu’il se passe quelque chose d’anormal.
Il faut faire une pause, réfléchir… on décroche la 406, et on va essayer avec le crochet de remorquage de devant, on y verra mieux avec les phares, j’engage la marche arrière, l’embrayage empeste toujours, ça fume encore, mais ça ne bouge toujours pas. Les cultivateurs dorment encore à cette heure-là, pas moyen d’aller chercher un tracteur ! On persiste, mais cette fois, par à coups ; tiens, on dirait qu’il se passe quelque chose : ça a bougé, on continue ; centimètre par centimètre, on y arrive enfin ; je reprends le sourire, crispé quand même ; quelques minutes plus tard, elle est enfin sortie de ce mauvais pas. Talus : tu ne nous auras pas eus !
On raccroche le plateau, on range la 406 dans la cour, trois quarts d’heures plus tard, nous partons enfin.
Après une heure de route, nous arrivons à Dieppe, juste à temps pour embarquer : le jour naissant nous laisse deviner une mer en furie, j’avais oublié, qu’une tempête était prévue. Qu’importe, je ne suis pas malade en mer, par contre, pour Romain, c’est autre chose. Le bateau va-t-il partir ? Ca a l’air de pas mal souffler quand même. On embarque, la voiture est basse pour passer les portes du ferry, ça touche presque à ce fichu bas de caisse et à la flèche du plateau….sans rien dessus. Le retour, s’il y en a un, sera hasardeux, je pense.
Nous voilà installés bien au chaud sur les fauteuils réputés si confortables du ferry LD Line. Romain regarde la mer, elle est belle…Sa tête commence à changer, ça bouge déjà dans le port. Je vais prendre un bon bol d’air sur le pont en attendant le départ.
08h00, enfin le départ. En effet, ça bouge, mais c’est sympa, ça roule un peu. Romain change de couleur, va-t-il déjà aller visiter les petites cabines fermées ou le pont extérieur ? Il résiste le bougre, mais tiens, il a un drôle de teint : couleurs très changeantes ! Une petite photo pour immortaliser la scène s’impose.
Quant à moi, sur le pont bien au frais, ça réveille son homme, et de plus, j’ai déjà faim. « Et toi, tu veux manger quelque chose ? - Ca ne va pas, je n’ai pas faim, je dors ! - Soit, soit, moi, j’ai faim. » Après maintes réflexions dans le style : « ça ne va pas, j’ai mal au ventre, il ne faut pas que je me lève, ça tourne…. » Nous voilà enfin en vue des côtes anglaises et du port de Newhaven.
Accostage, encore un peu d’attente, passage de la douane, sans encombres. Nous quittons le bateau, nous sommes sur le sol anglais, ne pas oublier, ils ne conduisent pas du même côté que nous ; avec la nuit difficile, il faut rester concentré : les ronds-points, ça va faire bizarre, mais il maîtrise qu’il me dit l’ami. Ok, je fais confiance.
Nous voilà en route pour 310 kilomètres, avec passage sur la célèbre M25, puis évitement de Londres pour se rendre à Worcester. La route est correcte, on ne croise quasiment pas de Mini, mais quelques vieilles guimbardes comme seuls savent les faire les Anglais. L’heure de manger approche, goûterons-nous ce jour l’agneau accompagné de sa mint sauce servie avec ses petits pois fluos ? Non, nous nous contenterons d’un modeste sandwich au goût indéfini, accompagné de son coca.
Bientôt Londres ; ne surtout pas s’y aventurer, il faut prendre à l’Ouest en direction de Warwick et de Bromsgrove. Ce n’est pas facile, c’est écrit en anglais partout, bref, on roule, j’ai imprimé notre itinéraire sur Via Michelin, c’est un jeu d’enfant…
A un moment, l’un de nous a trouvé des panneaux différents de ceux de notre carte…………………….On ne s’est pas trompé, c’est impossible, on n’a pas besoin de GPS, nous ; on fait ça à l’ancienne ; une carte, rien de plus fiable !
Sauf qu’au lieu de bifurquer à l’ouest, cette brave M25, on est en train de la prendre plein est. Peu importe, il n’est jamais trop tard, on va prendre la première sortie. Cette sortie, on l’a attendue un bon bout de temps ; environ 100 bornes plus tard, la voilà enfin, tant pis, ça ne fera jamais que 200 bornes de plus, le budget essence va en souffrir.
Tiens, il pleut, normal, c’est l’Angleterre, tiens, il tombe du grésil, c’est normal, on est en mars. Tant qu’il ne neige pas, c’est le principal.
Après quelques menues hésitations et 200 kilomètres à ajouter au trajet normal, nous voilà enfin à proximité de Worcester. Un coup de fil à notre hôte et nous voilà arrivés devant sa maison où trône une magnifique Blue-Frog.
Celle-ci est accompagnée d’une GTM K3, et d’une Marcos MK5 rutilante. Bel accueil !
Mr and Mrs Garland nous attendent sur le pas de la porte et nous invitent à rentrer ; il fait froid outre-manche, la neige fondue commence à tomber. C’est maintenant le tea- time. Nous serons reçus dans le salon, où la déco donne le ton : quelques dessins de Marcos au mur, le reste très british…Après quelques discussions avec notre hôte qui ne manque pas de se moquer de notre accent, nous faisons nos emplettes de « goodies » du club ; badge de calandre, de couvre culbuteurs, porte-clés et stickers divers.
J’en profite pour payer l’auto en euros ; c’était intéressant pour leurs futures sorties en France. Il trouve vraiment bizarre que j’aime la Marcos alors que je n’en avais encore jamais vu auparavant ! Je lui explique que je connais depuis déjà longtemps par le biais des magazines et d’internet ; il n’est pas convaincu. Il me propose par conséquent de m’emmener tranquillement faire un tour dans sa mk5 rutilante pour me montrer ce que c’est.
J’adore aux premiers tours de roue, je m’attendais à ça et suis encore plus convaincu du bien- fondé de mon achat. Je ne suis toujours pas monté dans la future mienne, mais saisis l’occasion, tel un gosse, dès notre retour. Avec mon mètre quatre-vingts, coincé dans cette boite d’un mètre dix de haut et mon sourire béat, je pense avoir eu l’air un peu stupide, mais « Honni soit qui mal y pense ».
Encore une petite visite au garage, pour nous montrer la Subaru de Mme et une autre Marcos MK4 en parfait état… J’ai su plus tard qu’il avait possédé un bien plus grand nombre de Marcos.
Il est maintenant l’heure de monter KAA101E sur le plateau. Jeu d’enfant s’il en est, mis à part la température extérieure, et la NEIGE qui tombe maintenant à gros flocons. On aura tout eu. J’ai les mains en feu, le jean mouillé, mais Romain ne se laisse pas abattre et sangle l’auto dans les règles. Je charge en même temps les deux pare-brise que mon ami Bernard m’a demandé de ramener.
L’affaire est rondement menée ; il fait nuit maintenant, il va falloir songer à la suite, à savoir, le retour. Avant cela, Roger nous propose d’aller manger ensemble dans un pub non loin de là ; nous acceptons volontiers, le dernier vrai repas étant loin. L’affaire se gâte ; les menus ne sont pas clairs pour nous ; restons prudents, tentons quelque chose où le mot « meat » apparaît, on sera au moins sûr de manger de la viande. Accompagnée de « crips », ce sera des frites. Les frites, sont en fait des pommes de terre entières, trempées dans la friture, et la viande n’est qu’un simple hamburger avec du steak haché noir. Quant à nos amis, ce qui était dans leur assiette n’est toujours pas connu de nous…
L’heure avance, nos amis règlent la note (fort sympathique). Nous songeons au départ pour être demain matin à l’embarquement de Newhaven. Nous nous quittons maintenant en nous donnant rendez- vous mi-juillet pour Le Mans Classic.
Où allons-nous dormir ? That is the question ! Nous avons la nuit pour faire le trajet et une petite marge d’erreurs. Le retour ne nous fait pas peur, nous nous sommes déjà trompés une fois, on ne se fera pas avoir une deuxième. Non, ce qui nous inquiète, un peu, c’est plutôt la neige qui tombe vraiment à gros flocons……la route commence à blanchir, il va falloir assurer ; cette fois notre attelage est plus lourd.
Romain est un vrai chef, il conduit sur des œufs, la Marcos ne bouge pas, tout est bien callé, ça va aller.
Arrive le temps de la première pause : plein d’essence, vérification de l’attelage, RAS, c’est reparti. Il ne neige plus. L’heure avance, la fatigue se fait sentir, Romain a de petits yeux. D’un commun accord, il est décidé de faire une première vraie halte repos dans la voiture. En hommes prévoyants, nous avions notre bon petit duvet. Chacun à sa place, un duvet pour deux, la bataille fut rude, la nuit, « je tire la couverture à moi », notre brave Romain s’est retrouvé sans rien. « J’ai froid me dit-il après une heure de sieste. - Tu m’étonnes, il gèle dehors ! - Ah tiens dans la voiture aussi ! »
Fous, mais pas téméraires, il ne nous reste qu’à reprendre la route et mettre le chauffage à fond. C’est aussitôt plus agréable. Romain a récupéré un peu, nous pensons que le mieux est de nous rapprocher de Newhaven pour n’avoir qu’un petit bout de route à faire sur le matin. Nous roulons sans encombres ; la Nissan est en fait confortable, jamais je n’ai eu mal au dos, moi qui en souffre souvent. Les kilomètres défilent, les premiers panneaux Newhaven se succèdent. Nous décidons de nous arrêter aux alentours de Brighton, Romain commence vraiment à accuser le coup. Un petit renfoncement sur le bord de la route suffira amplement pour un autre repos de trois petites heures. Ne pas oublier de faire sonner le portable !
Bientôt le jour pointe le bout de son nez, il fait froid mais beau, les quelques miles restants sont une formalité.
La file de voitures sur le quai d’embarquement n’est pas bien grande, La Marcos a du succès, Nous commençons à avoir des têtes déconfites. J’appréhende un peu le passage de la douane ; les papiers de la Marcos sont en règle, les certificats de vente sont remplis en deux exemplaires : l’imprimé anglais et le français, la voiture est déjà assurée. Une espèce de gros bonhomme roux à l’allure irlandaise s’approche de nous ; c’est la douane ! « Morning’ ! It’s a Marcos ! I know this car. Nice toy ! You bought it there? - Yes. - Papers, please. » Le dédouanement s’est déroulé le plus simplement du monde. Nous ont été demandés juste nos papiers personnels, mais rien concernant la voiture.
La mer est calme, Romain est heureux, il va pouvoir se reposer durant la traversée. Lui resteront à faire les 60 kilomètres reliant Dieppe à Fécamp et 70 pour rejoindre Rouen.
Les côtes sont en vue, ça sent le début de la fin. Le téléphone capte enfin les réseaux français. Mon ami Alex m’avait demandé de l’appeler quand on arriverait pour qu’il vienne à notre rencontre et être ainsi le premier à voir l’engin.
Encore un peu d’attente, avec l’accostage, la sortie des poids lourds, puis, c’est à nous, le convoi est vraiment bas, ça passe les calles du bateau à quelques centimètres.
Nous voilà sur le sol français, cependant, mes appréhensions ne sont pas encore tombées………Il nous reste une formalité et pas des moindres ; le passage de la douane française………..Si mon ancien copain de fac, maintenant douanier à Dieppe, pouvait être là, ce serait extra ! Notre tour arrive, les douaniers contrôlent ; certains camions sont mis sur le côté pour de plus amples vérifications. Je scrute les alentours pour voir si je croise la tête espérée, non ; apparemment pas là ! Une femme approche. Nous sommes sérieux, Romain baisse sa vitre, « bonjour Madame. - Papiers, s’il vous plait. Les vôtres et ceux du véhicule ». Avec un peu de culot, je lui demande si mon ami travaille aujourd’hui. « Oui, il est là-bas, mais il est occupé. - Tant pis, j’aurais voulu le saluer ».
Et c’est comme ça que s’est effectué le passage, tout en douceur, on ne m’a même pas demandé les papiers du véhicule, ni les certificats de vente…
Je suis heureux comme un gosse. Alex nous attend sur le rond-point de la sortie du terminal ferry. Romain a hâte de rentrer, une petite photo de l’auto sur le sol normand et nous reprenons la route ; on n’arrête pas une équipe qui gagne.
Le temps est gris, les nuages cotonneux, un vrai ciel de neige. Il commence à tomber du grésil, ça nous rappelle quelque chose… plus nous approchons de Fécamp, plus le temps se charge, il tombe maintenant de la neige fondue, on en a plein le dos. Fécamp arrive, c’est la fin du périple.
La maison est là : Il faut passer la grille en marche arrière ; de jour, Romain sait mieux faire. L’attelage est garé dans la cour. Un petit café sera le bienvenu.
Ne dirait-on pas qu’il neige encore ? Eh oui, ce sont maintenant trois bons centimètres qui recouvrent entièrement la Marcos !
Romain n’a plus que soixante-dix kilomètres à faire seul, le plateau vide, sous la neige ; il veut rentrer au bercail, je le comprends. Il aura conduit environ 880km.
Merci à lui, sans qui ce voyage n’aurait pu exister, ainsi qu’à son savoir-faire et son flegme tout britannique.
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L’auto n’avait pas tourné pendant un an, pour une panne de neiman, mais depuis, elle roule.
En juillet 2008, sa première vraie sortie a été lors du Mans Classic, en route vers d’autres aventures ; contacteur de frein commandé à la hâte, voiture « terminée » le vendredi soir, pour un départ de bonne heure le samedi matin, vers un périple de 400 kilomètres sous la chaleur, en plein week-end ! Mais c’est une autre histoire…